Le 22 mai 1542, en réponse aux demandes formulées par Martin Luther dans le cadre de la Réforme protestante, le pape Paul III convoque le concile de Trente qui va débuter le 13 décembre 1545. Il sera clos 18 ans plus tard, confirmant la doctrine du pêché originel, l’autorité de la Bible, les sept sacrements, le culte des saints et des reliques. Destiné à l'origine à restaurer l'unité de l'Église, ce concile fut en réalité une réponse du catholicisme à la Réforme protestante, à travers la révision de sa discipline et la réaffirmation solennelle de certains dogmes.
Marie de l'Incarnation, fondatrice des Ursulines
En cette première moitié du XVIIème siècle, les consignes du Concile sont désormais connues et beaucoup s’attachent à les faire appliquer. De cette volonté, vont naître nombre de congrégations religieuses, unies dans la volonté d’aider son prochain. Chaque diocèse se mobilise pour tenter de reconquérir le terrain perdu face au Protestantisme. Les dérives et débauches nées dans une société désorganisée par les guerres de religions doivent disparaître sous l’égide d’un épiscopat rénové. Des vœux déjà mis en place en Italie du Nord, à Brescia, où il existe un mouvement charitable et enseignant, créé par la volonté d’Angèle Mérici. Associée à vingt-huit jeunes filles, elle a fondé en 1535, dix ans avant l’ouverture du Concile de Trente, la Compagnie de Sainte-Ursule qui réunit chaque matin les petites filles de la ville, leur enseignant le catéchisme, les principes chrétiens, la lecture et l’écriture.
Le 19 janvier 1643, la supérieure de la communauté des religieuses Ursulines de Montereau, Mère de l’Ascension, accompagnée de Sœur Marguerite-Angélique de Saint-Jacques et Sœur Marie des Anges, présentent une requête au conseil de la ville de Sens sollicitant l’autorisation d’installer un monastère et «… d’y faire l’exercice des escolles pour les jeunes filles, les instruire et enseigner gratuitement tant en piété et religion qu’aux bonnes mœurs et à lire et escrire et aultres honnestes occupations et exercices, esquelles leur sexe et condition leur permet de s’appliquer aussy de prendre des pensionnaires pour recevoir les mesmes instructions et enseignements… ». Le conseil de la ville répondra favorablement et décidera «… que pour le bien et l’utilité de ladite ville, lesdites religieuses Ursulines de Montereau seront reçues pour faire couvent et communauté, en l’un des faulxbourg seulement et à leur choix…».
Mais sœur Marie des Anges, n’est pas venue à Sens par hasard : elle s’appelle Marie du Tour et son père, Pierre, n’est autre que conseiller et élu pour le roi en l’élection et siège présidial de Sens. Sa mère, Charlotte, est la fille de Balthasar Taveau, greffier de l’Hôtel de Ville, qui lui avait laissé en dot un hôtel particulier rue de l’Epée où vont s’installer, en attendant les autorisations nécessaires, nos religieuses. Marie des Anges avait-elle une idée derrière la tête ? On peut s’en douter, car depuis 1642, Pierre du Tour avait cédé à la communauté religieuse de Marie un jardin et quarante livres de rente sur un ensemble de petites maisons proches de la porte du faubourg Saint-Antoine… Mais pour l’heure, le Conseil leur concède le droit, pour six mois, d’installer leur communauté, temps pendant lequel elles pourront aménager leur couvent et ouvrir leur première classe dans un local prêté par les chanoines de Saint-Etienne rue du Pied-Fort (rue Montpezat). La demande de fondation d’un monastère sera entérinée par Monseigneur Octave de Bellegarde le 19 mai 1643.
Installées rue de l’Epée, les sœurs vont tenter d’entrer en possession de la maison du faubourg Saint-Antoine. Depuis 1641, elle est occupée par Michel Desboys et sa femme, Madeleine Barthélémy, marchands merciers. Après avoir trouvé un accord financier avec ces derniers, elles vont pouvoir entrer dans les lieux avant la fin du temps imparti par le Conseil. Peu à peu, grâce à des dons et à des achats successifs, les sœurs vont agrandir leur établissement sous la surveillance du nouvel archevêque, Monseigneur de Gondrin. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, mais le ciel monacal n’allait pas tarder à s’assombrir. C’est Pierre du Tour qui le premier, en 1644, va montrer sa mauvaise foi en contestant la propriété du faubourg Saint-Antoine sous prétexte qu’elles ne lui ont pas payé de loyers depuis la donation en 1642. S’en suit un procès et une transaction qui va permettre de régulariser cette situation.
En 1648, le cardinal Mazarin n’est plus en odeur de sainteté à Paris et en France, ce qui, à cause de la guerre d’Espagne, rejaillit sur les soldats qui prennent sur l’habitant ce qui leur manque : vols, pillages, rapines, incendies, meurtres et rançons sont le quotidien des troupes. Le salut des âmes n’est plus que dans la fuite afin de chercher refuge dans les murs de la ville. Il en sera ainsi des Ursulines qui se réfugièrent au Grand Hôtel-Dieu au début de l’année suivante. Abri de fortune qui ne va durer que six mois, les chanoines les priant d’aller exercer leurs dévotions ailleurs. Contraintes et forcées, elles vont s’adresser au Conseil de la ville pour leur permettre de rester au cœur des murailles, demande qui leur sera accordée. Pour un temps seulement, temps pendant lequel le calme va revenir. Mais il leur fallait néanmoins quitter l’Hôtel-Dieu sans pouvoir, pour l’instant, réintégrer leur habitat saccagé par la soldatesque. Grâce à la bienveillance du maître pâtissier Savinien Certain elles vont acheter une petite maison, contiguë à celle donnée par… Pierre du Tour. (A suivre)
Gérard DAGUIN
Documentation : Bernard Brousse, SAS, Virginie Garret, Cerep 5, rue Rigault Sens. Bulletin de
Sainte Angèle Merici
Sainte Angèle Merici par Pietro Calzavacca
Elle est née à Desenzano en 1474 et décédée à Brescia le 27 janvier 1540. Elle est la fondatrice de
Date de dernière mise à jour : 02/07/2021